Premier festival français de séries adaptées d’œuvres littéraires, Marseille Series Stories s'est implanté du 21 au 24 novembre dernier au cinéma Pathé La Joliette, avec la même ambition de donner le goût du livre, tout en mettant en lumière les histoires, les auteurs et le travail d'adaptation. Rencontre avec Clémentine Poidatz, membre du jury.
« Clémentine, tu étais membre du jury de cette nouvelle édition de Marseille Series Stories. Qu’est-ce qui t’a attirée vers ce festival ?
J’ai été flattée qu’on me le propose. J’ai déjà été jury pour des festivals de courts et moyens-métrages, pour des films étrangers aussi, et je m’étais posé la question de ma légitimité. C’est compliqué, surtout quand on connaît la difficulté que ça demande de créer une œuvre audiovisuelle. Maintenant, je le vois différemment. J’adore la télé, je suis une grosse « bingeuse ». Il y a plein de moments où je me dis que j’aimerais trop adapter un livre que je lis, ou que quelqu’un s’en empare. Les tables rondes proposées par le festival sont très intéressantes.
Pour toi, de quelle ambiance est parfumé ce festival ?
C’est très agréable de regarder des séries sur un grand écran et dans des salles remplies. C’est une chouette et rare expérience, puisque finalement, on est souvent seul face à sa télé. Le public s’est déplacé en masse. J’ai rencontré une spectatrice qui me disait qu’elle allait tout voir ! Il y a un vrai attrait pour la production française et étrangère.
Comment expliques-tu le succès des séries françaises et leur exportation à l'international ?
Je suis arrivée à la télé au moment où les choses commençaient à bouger un petit peu. Je viens du cinéma d’auteur, du théâtre classique, national, donc au début, j’avais un tout petit peu peur de la télé. J’ai commencer à tournée en 2005 et pas mal de choses ont changé. Des ponts existent pour les réalisateurs et les acteurs de cinéma pour aller vers la télé. Les choses évoluent grâce à des personnes qui ont pris des risques. Je ne suis pas sûre que les producteurs de Tchernobyl pensaient que ça allait faire un tel carton. Ça a donné envie de s’emparer de sujets politiques. Et puis le regard du spectateur devient de plus en plus aiguisé. En France, il y a un attrait pour le polar. Avant, mon but dans la vie était de faire du cinéma. Maintenant, ce n’est plus ça. En tant qu’actrice, c’est une chance énorme d’avoir le temps de développer un personnage, d’évoluer avec.
Si tu devais continuer l’histoire d’un personnage que tu as incarné dans une série, ce serait lequel ?
C’est difficile de répondre à ça (rires). J’ai eu l’un des rôles principaux dans la série Mars, pour la Fox. Je ne connaissais rien du tout à l’espace, ni qu’on cherchait à aller sur cette planète. On s’est formé pendant des mois avec des astronautes de la NASA, de Space X, des chercheurs, etc. L’expérience a été démentielle. Puis, au moment où Disney a racheté la Fox, on n’a pas pu faire de troisième saison. J’ai eu une grosse frustration. Ça a été un bout de ma vie, trois ans de travail. Ces coups de cœur de personnages, je les ai aussi pour des unitaires. Je suis contente d’évoluer avec Constance Vivier sur Noir comme Neige. On est comme une petite famille avec Laurent Gerra. À chaque fois qu’un tournage se termine, c’est comme un petit deuil pour moi. Ce n’est pas juste une expérience collective, c’est aussi un lien intime qu’on créait.
En effet, on évolue dans une bulle pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, puis on doit se reconnecter à une réalité…
Je suis d’accord. Et puis, je pense être addict au fait de vivre la vie d’autres gens que moi. Fin septembre, j’ai terminé une série pour Canal + qui s’appelle Sud Est Babylone, réalisée par Danielle Arbid, sur des expats à Singapour. Ce tournage s’est étalé dans le temps et quand ça s’est arrêté, j’étais hyper triste. J’ai joué le rôle d’une femme juive, intégriste, qui vole un enfant dans un épisode de César Wagner. J’ai adoré plonger dans la trajectoire de cette femme qui est tout sauf moi. Ce sont donc à chaque fois des petits moments de tristesse, avant que la vie ne revienne. Et il faut bien qu’elle revienne pour qu’on puisse s’en nourrir et la jouer.
Quelles images te reviennent de la première série dans laquelle tu as tourné ?
Il me semble que c’était Chat bleu, chat noir de Jean-Louis Lorenzi. Une série d’époques se passant dans un cabaret. Je me souviens du rythme de travail, intense. Puis la série Les enfants d’Orion m’avait marquée, réalisée par Philippe Venault. C’était sur le mythe du sauvage. Je jouais une jeune femme vivant dans les bois et qui avait besoin de tuer des animaux pour se sentir bien. Je devais boire du faux sang de sanglier alors que je suis végétarienne… Il y avait un rapport étrange à la chair animale. J’ai adoré travailler avec Philippe qui nous a malheureusement récemment quittés. Ça a été une expérience marquante.
As-tu le temps de regarder des séries ?
Oui, je regarde beaucoup de séries et lit moins de livres qu’avant. Mon œil s’est fait à l’écriture cinématographique, télévisuelle et théâtrale, aussi. Je lis beaucoup en anglais pour travailler ma compréhension de la littérature anglo-saxonne. Quand je lis, j’imagine toujours tout en film (rires). Je suis curieuse. Je regarde à peu près tout ce qui sort, pas forcément dans son intégralité, sinon je passerai ma vie chez moi.
Quels sont tes prochains projets ?
Il y a donc la série Une amitié dangereuse sur la violence de la Cour et la jeunesse de Louis XIII, il avait 14 ans quand il accéda au trône, puis épousa Anne d’Autriche (fille du roi d’Espagne) dans un mariage forcé. La série évoque cette violence et comment exister en tant que femme à cette époque-là. Alain Tasma est un très grand réalisateur, exigeant, précis. C’était une belle aventure. Ensuite, je peux te parler du film Reine mère avec Camélia Jordana, Fianso et Damien Bonnard, une comédie dramatique dans les années 90 à Paris.
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